24 avril 2019 (13e sortie) : col du Tourmalet sous la neige

Chaque semaine, j’ai une livraison de glacière à faire sur Bagnères (étant donné que je n’y suis plus le samedi régulièrement), ça tombe généralement le jeudi ou alors un matin quand je commence l’après midi le travail.

Quand ça va le permettre je pourrai en profiter pour pédaler sur des sorties courtes du coup puisqu’en général je commence le travail à 13 h ou 14 h jusqu’à 19h30 au moins.

Pour ce mercredi, je commence à 14 h.

Depuis 1 semaine et le premier Tourmalet de l’année le 17 avril, il s’en est passé des choses…

Le soir même du 17 avril, en rentrant du travail, je me suis trouvé pas bien. J’ai passé une nuit épouvantable comme ça ne m’était plus arrivé depuis 20 ans ! Par la suite, je n’ai tout simplement rien pu manger en dehors de quelques cuillères de riz blanc pendant 6 jours !! Je ne comprenais pas ce qu’il m’arrivait car à part ça je pouvais aller au travail et tout ça, mais je ne pouvais rien manger…

Pour ce mercredi matin, je commençais à sentir que je pouvais de nouveau manger, mais je ressentais du coup une très grande fatigue générale. Mais après avoir raté quelques journées ensoleillées, j’avais plus qu’envie d’aller pédaler là même si il ne faisait pas très beau.

Et aussi, dans la semaine, j’ai pu récupérer mon vélo de route que j’avais laissé pendant 3 semaines entre les mains de l’ami Tony, je vais donc aller le roder.

Le temps n’est pas très ensoleillé mais plutôt nuageux agrémenté d’éclaircies d’après les prévisions. Mais les sommets sont quand même dans les nuages et il ne fait pas très chaud au départ…

Je dépose ma glacière puis je me change.

La veille il a fait doux, c’était agréable. J’hésite beaucoup sur ma tenue. Bermuda, veste thermique, fine écharpe seulement et gants courts d’été finalement.

Mais je ne suis pas confiant, je crains de prendre une averse à un moment donné…

Mais au moment d’enfourcher le vélo, j’ai droit à des éclaircies, ouf ! Ça fait plaisir. Je ne savais pas trop où j’en étais après cette semaine pas bien qui vient de s’écouler et il fallait dans le même temps que je ne traine pas trop car après il faut que je me préparer pour aller au travail.

Allez, on pédale ! Plus je remontais la vallée et plus c’était nuageux, mais ça me semblait quand même lumineux plus haut…

Les jambes sont moyennes, ni géniales, ni mauvaises, j’ai du mal à situer les sensations. Je passe Sainte Marie de Campan, c’est parti pour les 17 km d’ascension. Après une semaine sans pouvoir pédaler, j’apprécie énormément d’être sur le vélo quand même, que ça fait du bien !

Les 4,5 premiers kilomètres jusqu’à Gripp sont roulants, j’essaye de ne pas perdre de temps là. Le ciel devient très menaçant, presque noir… Je commence à gamberger… Je me demande si il ne vaudrait pas mieux que je fasse demi tour… Puis je me dis que tant qu’il ne pleut pas je continue. Je cogite, ça va à fond dans ma tête, je ne sais pas trop quoi faire…

A Gripp, ciel menaçant, j’étais presque sûr de faire demi tour peu après, mais finalement…

Je passe Gripp et j’attaque les 12,5 km à 9 % jusqu’au sommet. J’ai la sensation de trouver un rythme régulier qui me conviendra jusqu’en haut je pense. Mais en passant le panneau des 12 km, il se met à pleuvoir… Une pluie glaciale… Mais qu’est ce que je fous là… J’ai le souvenir de ce 4 juin 2011, du Tourmalet sous une pluie glaciale et depuis je m’étais juré de ne plus le grimper par ce temps… Et là je suis en train de faire pareil…

Là j’ai vraiment une bonne raison de faire demi tour, mais je regarde plus haut dans la direction que prend la route, et il y a des endroits lumineux voire même de mini trous de ciel bleu j’ai l’impression… Allez je continue. Pendant 3 kilomètres, il pleut de plus belle, je suis trempé, je claque des dents. Finalement tout ce temps passé à gamberger, j’ai avancé en même temps et après 3 km sous la pluie, la route change de direction, je passe le panneau des 9 kilomètres, et il s’arrête petit à petit de pleuvoir. Je respire un peu mieux. La route devient même sèche et le ciel se dégage.

Et chose incroyable, en passant le panneau des 8 km, j’ai droit à des rayons de soleil et encore mieux quelques centaines de mètres plus loin, après le lacet du Garet, je change d’orientation et là dans la forêt des deux côtés, devant moi j’aperçois le Pic du Midi et un ciel bleu. Incroyable !! A cet endroit le champ de vision n’est que de quelques centaines de mètres et à 6,5 km du sommet je sais que la route va changer de direction encore pour mener vers le sommet, mais en attendant, je profite et j’ai confiance pour la suite car en voyant un ciel bleu comme ça, je ne peux pas imaginer ce que je vais prendre sur la figure juste après…

Je regarde l’heure, je suis dans les temps que je m’étais donné, je suis sur un rythme pour finir en 1h22 à peu près. Je suis plutôt content de ça après 6 jours sans manger.

A 6,5 km du sommet, la route vire vers la gauche et part en direction des paravalanches. Et là, le champ de vision s’élargit et je vois bien que je laisse les éclaircies derrière mois et que je m’en vais en direction des nuages. Quel contraste !

Dès la courbe à gauche en plus, le vent souffle, glacial… Je tremble de froid… Je galère à garder ma trajectoire… Il y a juste un point positif, c’est que depuis le début de l’ascension, je suis pratiquement tout seul et je n’ai presque pas vu de véhicule.

Le froid est tellement prenant et piquant que j’ai des larmes qui coulent. Je ne sens plus le bout de mes doigts… Mais pourquoi je suis parti avec les gants courts…

Je termine la zone des paravalanches et j’approche du panneau des 5 km à l’entrée de La Mongie…et ce que je redoutais arrive…des flocons de neige commencent à tomber…

Le spectre du Tourmalet dans le blizzard le 10 septembre 2017 resurgit…

Et au fil de la traversée de la station de La Mongie, les flocons se font de plus en plus nombreux. Et à 3,5 km du sommet, ce sont des gros flocons qui tombent, resserrés, je suis dans les nuages, je ne vois plus grand chose…

C’est dantesque, je tremble de froid, je me maudis dans la tête, il y a un silence qui plane, j’entends ma respiration, je souffle comme je peux entre 2 tremblements de froid. Et je continue de grimper, grimper, dans cette neige qui tombe. Je ne sais pas pourquoi je ne fais pas demi tour. J’ai l’impression d’être sur le chemin d’une autre planète, même pas 4 kilomètres avant j’étais sous de belles éclaircies et là je suis dans un autre monde.

Ma seule hantise sur l’instant c’est de ne pas voir à temps les plaques de verglas et de me retrouver au sol. Je croise les doigts pour ne pas avoir de verglas.

Le vent se lève de nouveau, la neige me fouette le visage, c’est juste hallucinant. Mon écharpe fine autour du cou est dérisoire.

A l’entame du dernier kilomètre je prends une photo tant que mon téléphone marche encore car avec le froid je sais qu’il va s’arrêter bientôt.

Qu’est ce que je fous là ?

Puis quelques centaines de mètres plus loin, là où ma galère sur le verglas avait commencé une semaine plus tôt, la route commence à être blanche, ça devient de la soupe, quand je roule, je sens la neige qui craque sous mes pneus. Deuxième photo et…mon téléphone s’arrête. Et là je réalise que je suis toujours en train de grimper, dans le blizzard à plus de 2000 m d’altitude, je dois aller travailler juste après et je n’ai plus de téléphone avec moi, seul au monde et c’est franchement grisant ! Une drôle de sensation. J’ai l’impression d’être attiré inexorablement vers le sommet. Je n’ai jamais pris de drogue mais je me demande si ce n’est pas la même chose qu’on ressent.

Juste après la route sera complètement blanche, mais le téléphone n’a pas tenu la distance

La route devient complètement blanche, je roule dans de la neige fraiche, je reste assis sur la selle pour ne pas perdre l’arrière. L’avant dérape et glisse constamment.

J’arrive au dernier virage. Je vais le passer à pied, je ne vais pas prendre de risque. Juste après, je tente de remonter sur le vélo, mais la couche de neige est trop importante. Allez je continue à pied en poussant le vélo. Il ne manque plus que voir un ours déboucher dans le blizzard après être sorti trop tôt d’hibernation et le tableau serait parfait.

Autant je n’aime pas me retrouver sur un bateau face à l’immensité de l’océan, autant, aller en montagne et continuer à grimper dans des conditions comme ça, sans savoir ce qui va me tomber dessus, j’adore !

Je débouche au sommet. Mon téléphone est en hibernation de son côté, je ne m’attarde pas. Je sors mon k-way et je repars avant de congeler sur place. A pied pour les 500 premiers mètres de la descente. J’appréhende la suite car je suis en bermuda et gants courts, je crains des engelures…

Mais qu’est ce que je fous là ?!!

Je remonte sur le vélo pour attaquer la suite de la descente. Je tremble tellement que je galère à garder la trajectoire avec ma roue avant. La neige continue de tomber. La douleur est terrible dans les doigts. Je m’étais pourtant juré de ne plus faire de conneries pareilles !!

La station de La Mongie, vite vite, sortir des nuages et repasser sous les éclaircies plus bas.

Mais doigts glissent des freins et c’est avec l’autre main que je dois les remettre sur les freins, tellement je ne sens rien. Descente vraiment acrobatique. Une fois que la neige s’arrête de tomber, je commence à être un peu plus soulagé. J’ai l’impression de revenir sur Terre.

Petit à petit je remonte en température.

La descente m’aura parue interminable…

Quel soulagement d’en finir !! Je ne pensais vraiment pas me retrouver dans cette situation sur ce coup là… Gants courts, bermuda, sous la neige au Tourmalet… Mais quels souvenirs !!! C’est la deuxième fois que je grimpe le Tourmalet sous la neige après le 10 septembre 2017.

L’avantage d’être dans des conditions comme ça, c’est que tu ne sens plus la pente tellement c’est dur de supporter le froid et tout ça^^

Au final j’ai fait l’ascension en 1h27 en ayant fait le final à pied dans la neige.

Et finalement l’après midi, je n’étais pas marqué ni par le froid ni par la fatigue au travail. Mais je suis revenu de loin. Et tellement déçu de ne pas avoir pu prendre plus de photos…

Et pas de chance pour mon vélo de route, c’est la 3eme année que je fais une sortie par mauvais temps dès que je le récupère de la révision^^

Vivement la chaleur quand même !!

(2 commentaires)

  1. Salut Idris !
    Non non, tu n’es pas drogué mais je peux t’assurer que t’es barge !!! LOL

    1. Ahahahaha 😀 ça me rassure alors, je suis toujours dans mon état normal 😀

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